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- Livre en Strettes ?
4. Contre le laisser-aller
Ce qui fait le caractère de ce travail est d’être une longue contrainte, le contraire, on l’aura compris d’un « laisser-aller ». Comprendre ce travail d’une haute exigence n’est pas chose facile, comment s’en approcher ? Par une comparaison et un exercice d’impersonnification : le poète rencontre le langage comme une substance autonome et nullement comme l’expression d’une intentionnalité qui pourrait lui devenir familière ou un outil dont il pourrait se servir. La chaise est, Martin Szekely ne fait pas semblant de présenter une nouvelle chaise, il fuit le grotesque d’une telle situation, sa posture consiste à se mettre dans une situation où il rencontre l’objet en le posant comme un sujet autonome ayant donc, comme ce mot l’indique, sa propre loi d’existence et avec elle sa définition, ses usages à remplir et un matériau qui lui est adéquat ; il ne disjoint point ces trois paramètres mais les unit dans un tout de façon à ce que le designer ne cache pas une chaise, mais que l’armoire fasse oublier son designer. La nécessité de laisser l’ouvrage (l’ergon de l’ergonomie) être ce qu’il est, exige une vigilance extrême et active, trait distinctif de ce travail. Vigilance à la définition dont la profondeur dépasse celle qui dérive de l’observation des choses ou de l’analyse des objets : il s’agit de prendre la table, la chaise ou l’armoire pour ce qu’elle est et ainsi la débarrasser de tout auteur, c’est-à-dire de tout dessin.
C’est en pleine liberté que ce travail obéit aux multiples lois qu’il se donne dont la rigueur et la précision défient toute formulation générale.
Ce qui importe alors avant tout, chuchotent unanimement les quarante-six ouvrages, c’est d’obéir longuement et dans un seul sens, c’est de ce bruissement que la contribution à ce livre a voulu s’approcher à défaut de le rendre plus distinct.
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